La lenteur au service de la sexualité
Je suis sexothérapeute et thérapeute de couples, j’accompagne des femmes, des hommes, des adolescents et des couples à améliorer leur vie affective et intime. Mon métier est très varié, car il y a autant de sexualités que d’êtres humains.
Comment la haute sensibilité peut impacter l’intimité ?
Dans la sexualité, tous les sens sont en éveil. Chez les hypersensibles, ils sont sur-développés, et on tendance à avoir un mental très présent. Tout ça peut amener des difficultés lors des rapports.
Comment je les accompagne ?
Parfois, des personnes ne savent pas qu’ils sont hypersensibles, dans ce cas-là, il y a toute la phase de découverte et d’appropriation de leur sensibilité.
Quand ils le savent, il y a des exercices à mettre en place et tout un travail de paroles et de déconstruction. L’objectif étant de construire ou reconstruire sa vie intime avec ce joli cadeau (parfois mal emballé) qu’est l’hypersensibilité.
Et en couple ça donne quoi ?
Le thérapeute de couple permet de fluidifier les échanges dans le couple. Je permets au couple d’écouter l’autre et de comprendre sa vision du monde. Ensuite, mon travail est de rallier le couple sur une « fréquence commune ». Je les aide à trouver un langage commun avec leurs différences.
On trouve ensemble leur recette pour vivre une sexualité et une vie intime et amoureuse qui leur ressemble.
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Le poids de la culpabilité
La culpabilité est souvent présente chez la personne hypersensible qui pense que tout est de sa faute si ça ne fonctionne pas. Cette culpabilité peut amener une perte de confiance et un repli sur soi. Mon rôle est alors de déculpabiliser la personne.
La sexualité n’est pas une lutte de pouvoir. Nous ne sommes pas responsables du plaisir de l’autre. C’est vraiment un échange à deux. J’aide la personne qui culpabilise à comprendre cela et à s’enlever cette pression-là tout en permettant au couple de se rééquilibrer.
Quand consulter ?
Bien sûr, je conseillerais de consulter avant d’avoir mal, bien que je suis consciente que ce n’est pas si facile de consulter. Dès lors qu’on ressent quelque chose de « pas juste », il est intéressant de consulter pour travailler là-dessus.
C’est un peu pareil pour le couple. Je conseille de ne pas attendre que ce soit le point de retour pour venir. Le couple serait alors trop abîmé. Si l’on prend le souci dès le début, le problème n’est pas encore complètement installé et c’est plus facile de travailler dessus. Ce n’est pas parce que l’on consulte un thérapeute de couple que le couple va mal. Une séance, c’est vraiment pour prendre soin de son couple, comme si on allait au spa ensemble.
Prendre soin de sa sexualité et de son intime, c’est réellement prendre soin de soi.
La sexualité est un cheminement et nous accompagne toute notre vie. On n’a pas la même sexualité à 20 ans qu’à 70. On évolue toute notre vie sur ce domaine.
La compatibilité sexuelle, ça existe ?
Je pense que la sexualité est un langage. Il y a des gens avec qui l’on communique plus facilement que d’autres. Pour autant, tout s’apprend. On ne peut pas dire qu’on est incompatible avec une personne. Je pense sincèrement qu’on peut être compatible avec une personne si on le souhaite, simplement cela va demander peut-être un peu d’écoute, d’éveil, de curiosité, de subtilité, et d’être sensible à tout ce qu’il y a autour. La sexualité est partout, dans un regard, dans un geste, dans une parole…
Comment fait-on pour lâcher prise ?
Le lâcher prise, c’est un peu le mal-être de cette société. La plupart des personnes qui viennent me voir souffrent de ce mental omniprésent. Je dirais que c’est le pire ennemi de la sexualité.
Chaque personne a sa propre recette pour lâcher-prise et met ce qu’il a envie dedans. Pour certains, ce sera d’aller marcher, d’autre de contempler ou de se reposer…
La sexualité consciente et le Tantra permettent d’expérimenter ce lâcher prise. Il est nécessaire de ramener la sexualité au langage du corps, au ralentissement à la lenteur. On se reconnecte à ces sens pour ressentir et être dans l’instant présent.
Il peut y avoir des exercices tout simples comme se regarder 5 minutes dans les yeux. Il se passe plein de choses dans un regard et aujourd’hui on ne prend même plus le temps de le faire.
C’est quoi le Tantra ?
Le Tantra, c’est un courant hindouiste, une philosophie de vivre qui prône l’art de ralentir. La sexualité est une énergie. Dans le Tantra, on utilise cette énergie sexuelle à des fins spirituelles bien que ce ne soit pas une religion. Le Tantra ne s’explique pas, mais se vit. C’est un outil que j’utilise dans mes consultations. Personnellement, je l’ai expérimenté et il y a vraiment un avant et un après pour moi.
Dans le Tantra classique, il n’y a pas de pénétration, d’orgie… Après, chacun le pratique comme il le souhaite. C’est un art de vivre et une rencontre à l’autre. Il y a aujourd’hui plein de Tantra, donc ce que je conseille si on est intéressé, c’est de vraiment se renseigner.
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Et le slow sex ?
Très en vogue en ce moment, le slow sex est une sexualité consciente. Assez proche du Tantra, on y retrouve la conscience, le lâcher prise et l’instant présent. Le slow sex permet de prendre conscience de ce qu’on aime, ce qu’on n’aime pas et de pouvoir le communiquer.
Bon nombre d’entre-nous avons été conditionnés à avoir une sexualité classique avec des préliminaires, la pénétration et ensuite la jouissance. Mais aujourd’hui, les gens ne s’y retrouvent plus. Pour beaucoup, cela n’a plus de sens. Les préliminaires sont en eux-mêmes un acte sexuel et la pénétration n’est pas obligatoire. On a tendance à ne plus prendre le temps aujourd’hui. Le slow sex et la sexualité consciente permettent de redécouvrir d’autres pratiques. On peut avoir des orgasmes sans pénétration. La lenteur ouvre de nouvelles sensations, s’attarder sur une caresse ou une odeur peut réellement décupler le plaisir, auquel on peut passer à côté lorsque que l’on ne prend pas le temps.
Un conseil à transmettre ?
Apporter plus de lenteur et de conscience dans tout ce que l’on fait. Dans la sexualité, c’est important d’être à l’écoute de soi, de son corps et de prendre le temps de « sexplorer », de se toucher, de se découvrir, de sentir…
Quand il s’agit de faire l’amour avec son ou sa partenaire, je préconise la lenteur. Aujourd’hui, on n’a plus de place pour rien. Tout va toujours plus vite. Donc on ne prend pas le temps de se poser des questions et de comprendre comment on fonctionne. On pratique presque mécaniquement. prenez le temps de faire l’amour, de vous observer, de caresser, de toucher, de découvrir chaque parcelle de votre corps qui peut être une zone érogène. Tout notre corps est zone de sexualité. Plus on joue avec tout ça, plus on découvre nos multisexualités.
