Le burn-out d’une hypersensible dirigeante d’entreprise
Il y a un an et demi, j’ai fait un burn-out professionnel et émotionnel. C’est pendant cette période où ma vie était complètement chamboulée, qu’à force de lecture et d’accompagnements, j’ai compris que j’étais hypersensible.
Je m’étais déjà posé cette question-là il y a quelques années, en observant mon fils qui avait des réactions me rappelant les miennes. La nounou me disait que mon fils réagissait vite et comprenait rapidement par rapport à d’autres enfants. Il a donc passé des tests de QI, bien que je ne souhaitais pas le mettre dans une case. Lors des résultats, la psychologue nous a expliqué ce qu’était le haut-potentiel. J’ai pleuré toute la durée de l’explication. Je comprenais enfin ce que je vivais depuis toute petite. Puis j’ai enfoui ça en moi, car à ce moment-là, on consultait pour mon fils et je devais m’occuper de lui.
Le burn-out : le début de la fin
Le jour de mon burn-out, tout est ressorti : mon hypersensibilité, mon trop plein d’amour, mon rythme trop intense… J’ai réalisé que j’étais une femme passionnée de tout, qui ne s’arrête jamais, car elle ne s’écoute pas. Je n’ai rien senti venir, car j’ai toujours été en suradaptation. Je ne me sentais pas entendue, pas comprise par les gens autour de moi. Moi-même, je n’arrivais pas à exprimer ce que je ressentais.
Mon burn-out s’est déclenché pendant un rendez-vous professionnel. Une dame a parlé très fort, elle était en colère, il y avait trop de bruit, l’ambiance était très particulière… Je ne me sentais pas bien, comme si j’allais faire une crise d’angoisse, mais je ne savais pas ce que c’était, je n’en avais jamais fait à ce moment-là. Je suis sortie boire un verre d’eau et je n’ai jamais pu retourner au travail pendant un an…
Techniquement, j’ai fait un malaise, et ensuite, je ne me suis plus sentie capable de rien. Mon corps n’a plus jamais rien voulu faire.
Le burn-out : c’est quoi ?
Burn = brûler
Le burn-out est un syndrome d’épuisement professionnel qui résulte d’une surcharge de travail, d’une forte pression et d’un manque de reconnaissance, face à l’investissement fourni.
Il correspond à un épuisement émotionnel, physique et psychique.
Il existe d’autres syndromes d’épuisement professionnel.
Le bore out
Bore = s’ennuyer
Le bore-out est un syndrome d’épuisement professionnel qui résulte d’un ennui chronique. Il correspond à une sous-charge de travail, un manque de stimulation et un sentiment d’inutilité.
Le brown out
Brown = baisse de tension
Le brown-out est un syndrome d’épuisement professionnel qui résulte d’une perte de sens au travail. Il correspond à une perte de motivation pouvant être due à l’absurdité des tâches, demandées, au non partage des valeurs transmises…
Quelles sont les causes de ce burn-out ?
Je pense qu’il y en a plusieurs : la cause affective amicale et la cause professionnelle.
Ce n’est pas simple d’être hypersensible et de diriger une entreprise. Quand on est patron, on n’a pas le droit d’avoir des émotions. Pourtant, j’en ai beaucoup. Quand j’arrive le matin, je dis bonjour aux 25 salariés et après, je vais dans mon bureau. En faisant ça, j’ai déjà 25 émotions en moi puisque je ressens les émotions des autres. Je sais exactement comment ils vont à chaque moment.
Aujourd’hui, j’ai appris à me protéger de ça, mais avant, je ne savais pas le faire. C’était très douloureux pour moi de savoir que telle personne n’allait pas bien. Je me disais que peut-être que c’était de ma faute, que j’avais dit quelque chose qu’il ne fallait pas, qu’il allait partir de l’entreprise…
Rien à voir avec le travail, mais même quand je vais au restaurant, je sais comment vont les gens aux tables d’à côté, de devant, de derrière… Mes intuitions ont donc été une réelle cause de mon burn-out.
Être maman pendant un burn-out
C’est très compliqué. Au début, j’essayais de me cacher, parce que dès ma première grossesse, j’ai entendu qu’il ne fallait pas que je sois stressée, car j’allais stresser mes enfants. Je culpabilisais, mais c’était impossible de le cacher sur la durée. On l’a donc expliqué à nos enfants en leur disant que je n’étais pas bien, que ce n’était pas de leur faute ni une maladie grave et que ça irait de mieux en mieux. Ils ont été super et ont su prendre des distances quand il y en avait besoin. Ils m’ont beaucoup manqué pendant cette période.
Ce qui m’a aidé pendant mon burn-out
Beaucoup de personnes m’ont dit de faire très attention car un burn c’est difficile pour un couple. Ca a été très dur d’entendre ça et en plus, je peux le dire aujourd’hui, c’est faux. Mon burn-out nous a beaucoup rapproché. Mon mari a été très présent, mes amis, ma famille et également les salariés de l’entreprise. J’ai d’ailleurs réalisé que même si je les aimais trop, ils m’ont montrées qu’ils m’aimaient avec leur soutient.
Il m’a fallu du temps pour ressortir de chez moi. J’ai été sous anti-dépresseurs et anxiolytiques puisque je ne pouvais pas sortir sans faire des crises d’angoisses. La pratique du yoga m’a aussi énormément aidé. Je n’en avais jamais fait car ça me semblait lunaire de se poser sur un tapis pour faire du yoga et de la méditation. Pour autant, ça a été très bénéfique.
Aujourd’hui, je fais du yoga toutes les semaines. Je fais aussi de la méditation depuis un an et demi même si c’est toujours très dur pour moi. J’aime aussi tirer un oracle comme intention de la journée, et m’arrêter au moins 5 min par jour pour stopper mon cerveau.
Comment je me suis sortie de ce burn-out ?
Ça a été très long. Ça a duré plus d’une année et demie et c’était très intense. Du jour au lendemain, je me suis retrouvée à passer mes journées dans mon lit à avoir peur de franchir la porte de la maison, d’aller me promener même pour faire 3 mètres. Je n’ai pas pu m’occuper de mes enfants. Je ne supportais aucun bruit. J’étais enfermée dans une pièce avec des boule Quies pour ne rien entendre. Je ne pouvais pas téléphoner, ni parler à ma maman alors que je suis très proche d’elle.
Pour m’en sortir, il m’a fallu du temps beaucoup de temps. Le temps nécessaire qu’il fallait à mon corps pour se reposer, et à mon cerveau, pour comprendre que j’étais allée beaucoup trop loin dans la suradaptation.
Comment j’ai appris à me protéger des émotions des autres ?
Au début, j’ai acheté toutes les pierres qui existent. J’avais plein de bracelets avec des Labradorites. Maintenant, grâce à la psychothérapie, j’ai appris à entendre cette petite voix à l’intérieur de moi qui me protège en me disant “Mandy, ce ne sont pas tes émotions, c’est les leurs, tu peux leur parler, les accompagner, mais ce n’est pas à toi. Je suis passionnée des relations et j’aurais rêvé d’être psychologue. Pendant mon burn-out, j’ai réfléchi à changer de voix, et j’ai réalisé qu’en étant dirigeante d’entreprise, je suis aussi un peu psychologue. Mes employés passent beaucoup de temps dans mon bureau, je les écoute énormément. Et quand ce ne sont pas les salariés, ce sont les clients. C’est important de comprendre le client, de savoir réellement ce qu’il veut et de pouvoir répondre à sa demande.
Comment diriger une entreprise quand on est hypersensible ?
C’est très dur. On m’a toujours reproché de trop fonctionner à l’affect. J’ai d’ailleurs horreur de cette phrase. Longtemps, j’ai été en suradaptation, j’essayais de mettre des barrières qui me faisaient souffrir, car je ne savais pas faire puisqu’en effet, je fonctionne à l’affect. En réalité, c’est comme ça que j’ai envie qu’on vive dans mon entreprise, à l’affect. Alors, un jour, j’ai décidé qu’il n’y aurait plus de barrières et que les gens allaient s’y faire. Donc oui, j’allais mettre de l’affect dans mon entreprise, je savais que ça ne conviendrait pas à tout le monde, mais ceux qui sont restés sont ceux qui aiment cette manière de fonctionner.
Par contre arriver à dire quelque chose de négatif quand on aime très fort, c’est tout un travail. Depuis mon burn-out, les employés savent que je suis hypersensible et que je ressens les choses, et ce n’est plus gênant. Ils savent que s’ils veulent parler mon bureau est toujours ouvert, et ce sont eux qui viennent s’ils le souhaitent. Je sais maintenant faire la part des choses et ils doivent la faire aussi.
L’après burn-out
Aujourd’hui, je suis heureuse, épanouie. Je me suis beaucoup documenté sur mon hypersensibilité et ma dépendance affective qui je le sais sont des raisons de mon burn-out. J’aime trop, j’aime tout le monde. Vraiment tout le monde. Même les gens méchants avec moi ! D’ailleurs plus on est méchant avec moi, plus je vais faire en sorte qu’on m’aime parce que je ne comprends pas la méchanceté.
Ma dépendance affective impacte principalement mes relations amicales. J’ai toujours besoin d’être rassurée par mes amis. Quand ils ne me donnent pas de signe de leur amour, je peux réfléchir pendant des mois en me demandant si je suis toujours leur amie, si je l’ai d’ailleurs déjà été… Bien que mes relations amicales soient belles, j’ai toujours envie qu’ils me disent qu’ils m’aiment, que je leur manque, qu’ils me proposent de se voir… Je suis toujours en demande. Je pose même des questions pour qu’on me rassure, mais ça ne marche pas à tous les coups. Et si ça ne marche pas, je suis malheureuse. J’ai perdu mon meilleur ami qui est décédé, et ça a renforcé ma dépendance affective envers les autres.
Par contre, je ne souffre pas du tout de dépendance affective en couple, car j’ai une énorme confiance en nous. Mon mari m’aime comme j’ai toujours rêvé qu’on m’aime.
Mis à part ce point de la dépendance affective qui me dérange, je suis aujourd’hui fière d’être hypersensible. J’aimerais beaucoup apprendre à mieux vivre ces relations humaines. J’ai toujours eu des relations très fortes. Mais au bout d’un moment, les gens se lassent ou la vie fait qu’on a moins le temps de se voir et c’est là où j’en souffre.
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Le mot de la fin
Quand le corps dit stop. Quand le plus simple devient le plus dur. Se réveiller, se lever, s’alimenter. Quand l’hypersensibilité peut nous amener au plus bas pour nous faire remonter au plus haut. Je tenais à remercier la vie et mon corps pour avoir dit stop et pour m’avoir permis de prendre du temps pour moi pendant un an et de rencontrer des personnes fantastiques et des univers méconnus jusque-là. J’en profite pour remercier mon mari, ma famille, mes ami(e)s, les salariés. Mention particulière pour Carole Anglade, sophrologue, qui m’a portée, supportée bien plus que son métier lui demandait, Pascale Boff Lemoine, psychothérapeute, pour tout ce qu’elle m’a appris et pour les séances de Neurofeedback. Mon psychiatre pour sa patience. Je remercie l’équipe de Pure Breath et plus particulièrement mes 3 profs de yoga, Charlène, Clélia et Juliette. Je remercie aussi ceux qui n’ont pas compris, qui ont jugé, qui se sont éloignés pour me permettre de grandir. Merci à toi Sophie pour ton écoute et tes conseils.
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