Vivre avec une hypersensible
Laura 34 ans découverte hypersensible depuis 2 ans et Patricia 52 ans sont en couple depuis 5 ans et demi. Elles se sont rencontrées lors d’un tournoi de poker et se décrivent comme un couple atypique avec leurs 18 ans d’écart. Laura nous parle de sa sensibilité, et Patricia nous explique comment vivre avec une hypersensible.
L’hyperesthésie
Laura dit qu’elle entend « tout », de la respiration de Patricia, au chargeur de son téléphone en passant par les micro bruits. Elle qui travaille en open-space le vit comme une véritable épreuve bien qu’elle se soit créé une espèce de cocon dans son box. L’odorat et le goût sont aussi très sensibles chez elle. On ne peut pas « la feinter sur un plat ».
Le seuil de tolérance
Lorsque Laura a atteint son seuil de tolérance au niveau auditif, elle ressent de l’énervement, et le moindre son peut la faire monter dans les tours très vite. Patricia est aujourd’hui consciente que quand Laura est dans cet état de fatigue, le moindre bruit comme celui de la TV, un raclement de chaise, un couvert qui tombe ou des appareils électroménagers en fonctionnement sont insupportables pour Laura.
Bien entendu, Laura n’atteint pas ce seuil tous les jours. Elle précise à ce propos que « tout peut être pris en compte. Par exemple, une journée où il pleut, ou je suis en retard et j’ai froid. Là, déjà, je pars avec un handicap, donc un déficit de crédit dans ces moments-là ».
La misophonie
Laura souffre de misophonie. Une aversion à certains sons ou bruits émis par d’autres comme les bruits de bouche. Manger ensemble est parfois compliqué pour les filles parce que ça fait des bruits de mâches, de fourchettes ou de respiration qui font « trop de bruits ».
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Repérer les déclencheurs émotionnels
Depuis que Laura a découvert son hypersensibilité, elle s’écoute plus. Elle sent ce qui peut potentiellement la déranger, et l’anticipe. Alors qu’avant elle laissait la télé, le micro-onde, la musique… et se fatiguait beaucoup plus et beaucoup plus vite. Elle précise même qu’à l’époque elle faisait beaucoup de crises d’angoisse. Aujourd’hui, elle en fait moins puisqu’elle se connaît mieux et anticipe ses besoins. Pour Patricia, gérer l’hypersensibilité au quotidien n’est rien à côté de crises d’angoisse régulières.
Laura souffre de crises d’angoisse depuis plus de 20 ans. Elle a rencontré plein de professionnels et a testé toutes les pratiques qu’elle a pu pour résoudre ce problème-là. La seule qui a fonctionné pour elle, c’était de chercher par elle-même, d’analyser et de comprendre l’origine de ses crises. Elle a d’ailleurs adoré être confinée parce qu’elle a pu profiter de ce temps pour faire ce travail-là. Et tout a changé… Le documentaire « I Am Not Your Guru » de Tony Robbins a vraiment été le point de départ pour elle. Elle a ensuite trouvé énormément de clés dans la PNL (programmation Neuro Linguistique). Elle veille à ne pas tout remettre sur le dos de son hypersensibilité. Pour elle, cela n’excuse pas tout et c’est à chacune de faire des efforts de son côté.
A lire sur le sujet : 2 outils pour mieux communiquer avec la PNL
Un atout
Aujourd’hui, Laura a du mal à voir en quoi sa sensibilité est un atout dans le couple. Aux yeux de Patricia, Laura a une telle sensibilité qu’elle comprend instantanément, en un seul regard, en une fraction de seconde l’émotion dans laquelle elle se trouve, et ce, dont elle a besoin et trouve cela extraordinaire. Laura sait à tout moment ce qui peut faire plaisir à Patricia.
Pour certains, cela peut être perçu comme une sorte de contrôle puisque l’hypersensible sait toujours dans quel état d’esprit l’autre se trouve. Si c’est le cas, Patricia pose ses limites. Pour Laura, ce n’est pas du tout du contrôle. Simplement, elle capte le moindre détail qui peut changer. Elle ne cherche pas à le voir, elle le voit naturellement.
Aimer à sa manière
Dans ses relations précédentes, Laura attendait de l’autre qu’elle l’aime comme elle l’aimait. Par exemple, si elle apportait sa tartelette préférée à sa partenaire, elle attendait en retour qu’on lui fasse pareil au point d’être déçue lorsque qu’elle n’avait pas sa tartelette. Aujourd’hui, elle a compris que l’autre l’aime à sa façon et ne recherche plus qu’on l’aime comme elle aime.
L’intimité
Dans l’intimité, ce qui dérange Laura au quotidien comme le son, les odeurs, le goût ne la dérange pas. Elle dit se sentir très à l’aise avec Patricia et n’ont aucune difficulté à communiquer ni aucun tabou.
Laura ajoute quand même que son cerveau n’est pas en off, d’ailleurs, elle ne comprend pas comment on peut ne penser à rien. Pour autant, cela ne l’empêche pas d’être connectée avec Patricia et de ne pas avoir besoin d’autre chose.
À la différence de quand elle regarde un film, même s’il lui plaît, elle a besoin de stimuler son cerveau avec un jeu sur son téléphone. La seule façon qu’elle a trouver de couper son cerveau. C’est assez paradoxal pour elle de se dire que pour se vider le cerveau elle doit le stimuler. En fait, quand elle est sur son téléphone, elle est concentrée sur ce qu’elle est en train de faire. Elle est donc dans le moment présent tout comme dans l’intimité.
A lire sur le sujet :
L’hypersensibilité dans l’intimité, ça donne quoi ?
Hypersensibilité et sexualité, ça donne quoi ?
Besoin de solitude
Laura exprime le besoin de partir seule en week-end. Non pas pour ne pas être avec Patricia, simplement pour être avec elle-même.
Dans leur couple, chacune a besoin d’être seule régulièrement. Elles n’ont pas besoin de tout faire ensemble et savent apprécier leur espace pour lâcher sur toutes ces petites choses du quotidien. Pour autant, elles se manquent énormément, autant qu’elles s’agacent précise Laura 😉
La clé : communiquer
Patricia et Laura ont cette facilité de parler de tout, et pas que des sujets qui font plaisir. Chaque discussion ne se termine pas par un bisou ou un câlin. Il y a parfois des discussions plus difficiles, pour autant, ça leur permet de poser les choses même si le dialogue n’amène pas toujours de solution. Elles n’ont pas de tabou et expliquent que même dans les situations très difficiles, il n’y a jamais eu de réelles remises en question du couple.
Pratiquer la CNV
Il est essentiel que l’hypersensible puisse exprimer ses sentiments sans se sentir jugé.e. Toutes deux utilisent la communication non-violente dans leur quotidien en évitant par exemple de dire « tu m’agaces quand tu fais ça », plutôt « j’ai besoin d’un peu de calme, je pars m’isoler 5 minutes »
A lire sur le sujet : Pratiquer la communication non violente
Pour elles, c’est important de se battre pour leur couple et de ne pas lâcher l’affaire. Lorsqu’il y avait des passages difficiles, elles étaient convaincues qu’elles finiraient par trouver des solutions et sortir de ces engrenages des crises d’angoisse, de l’hypersensibilité, de la ménopause…
Comprendre son mode d’emploi
Pour Patricia, l’amour permet tout. Il permet même à une non-hypersensible de vivre avec une hypersensible, de le comprendre, de lui prêter attention et de faire attention à ce qui le dérange.
Ce qui est important pour Laura, c’est que Patricia arrive à se détacher et comprenne que ce n’est pas elle qui l’énerve, simplement les bruits, les odeurs…
Avec le temps, elles ont appris les règles et le mode de fonctionnement de l’autre et n’ont pas du tout la sensation de vivre une galère au quotidien du fait de l’hypersensibilité de Laura.
Patricia précise que d’elles deux, celle qui pleure le plus, finalement, ce n’est pas Laura. ❤️
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