Témoignage : Libertinage ou couple libre ?

Relation libre, libertinage, polyamour… Comment être réellement soi dans ses relations intimes ? Comment sortir du modèle “classique” si celui-ci ne nous convient pas ? Et par où commencer pour savoir ce qui nous convient. Dans cet épisode, Thierry, 32 ans, papa de 2 enfants et séparé de leur maman nous raconte son cheminement pour trouver son équilibre dans ses relations sentimentales intimes. 

Quelle est ta vision de l’amour ?

J’ai été en couple pendant 8 ans avec mon ex-femme. Je dirai aujourd’hui que c’est la seule histoire d’amour que j’ai connu. Je ne ferme pas la porte à l’amour, mais je pense que du fait que je sois papa et que j’ai une activité professionnelle assez chargée, je n’ai pas un espace illimité à offrir à quelqu’un.

Ma vision de l’amour est donc assez triste. En toute franchise, je me questionne beaucoup sur l’amour, de manière presque philosophique :

• Est-ce que cela existe vraiment est-ce une chimère que l’on se crée nous-même pour se donner une “béquille”, pour répondre à un besoin…
• Qu’est-ce que j’attends de quelqu’un ?
• Qu’est-ce qui peut remplir des besoins ?
• Est-ce que j’aime ce que l’autre me renvoie ?

Je sais que “chimiquement” l’amour existe puisque je l’ai ressenti, mais je ne sais pas comment définir mon niveau d’amour.

Qu’est-ce qui a mené à la séparation avec ton ex-femme ?

Nous n’avions pas la même vision et les mêmes attentes de la sexualité. Je l’ai rencontré à 21 ans, elle en avait 17. Je suis tombé très vite amoureux, car à ce moment-là, elle répondait à tous mes critères :

• briller dans les yeux de l’autre
• sentir qu’on a de l’importance pour lui/elle et qu’on lui apporte beaucoup.

Au fur et à mesure de l’avancée de notre couple, je n’étais plus dans ces besoins-là. J’avais d’autre pilier dans notre foyer et elle ne pouvait pas répondre à cela. À l’inverse, elle avait besoin que je sois plus disponible, et je pouvais de moins en moins y répondre. De manière très franche, je lui ai dit que j’aimerais que sexuellement, on découvre d’autres univers, comme le libertinage. Je lui en ai parlé avant que nous ayons des enfants. Je lui ai proposé d’aller en club pour “découvrir”. C’était un rejet catégorique pour elle, ça l’a beaucoup peiné et remise en question et je n’avais pas anticipé cela. Après, c’est devenu un tabou. Nos chemins ont donc pris deux trajectoires opposées.

Aujourd’hui, je peux dire que 8 ans avec une même partenaire sexuelle, ce n’est pas possible sur mon modèle à moi.

Ton ex-femme est hypersensible, penses-tu qu’un hypersensible peut avoir une sexualité décorrelée des sentiments ?

Je ne suis pas expert sur le sujet, mais je pense que c’est compatible dans le sens où si l’on vit de manière décuplée ce qu’on apprécie, et si ce qu’on apprécie, c’est le libertinage et la sexualité atypique, alors c’est une façon de le vivre pleinement et de manière exacerbée.

Comment se passe ta vie amoureuse ? As-tu des sentiments pour certaines de tes partenaires ?

J’ai une partenaire avec qui je partage des moments de complicité sans que ce ne soit que de la sexualité. Nous sommes passionnés par des sujets communs et hormis la sexualité, nous vivons plein de chose de manière exclusive et notre relation pourrait s’apparenter à celle d’un couple. Sexuellement, nous sommes libres à 100%, il n’y a pas de jalousie. Pour autant, c’est vrai que j’aurais probablement du mal à entendre aujourd’hui qu’elle développe une relation amoureuse avec quelqu’un d’autre, et inversement.

Ton ex-femme est hypersensible, penses-tu qu’un hypersensible peut avoir une sexualité décorrelé des sentiments ?

Je ne suis pas expert sur le sujet mais je pense que c’est compatible dans le sens où si on vit de manière décuplée ce qu’on apprécie, et si ce qu’on apprécie c’est le libertinage et la sexualité atypique, c’est une manière de le vivre pleinement et de manière exacerbée.

Quel(s) mots utiliserais-tu pour décrire tes relations : relation libre, libertinage, polyamour ?

Aujourd’hui, je me qualifierai de couple libertin. Notre couple est ouvert et nous faisons également des soirées libertines. C’est-à-dire que nous partageons des relations sexuelles ensemble avec d’autres personnes et également séparés. Je pars du principe que ma partenaire ne m’appartient pas et que si elle ressent le besoin et l’envie de pratiquer la sexualité avec d’autres personnes, elle peut le faire.

Comment as-tu réussi à sortir du schéma classique du couple parental ?

C’était un réel coming-out pour moi. Je me rappelle de la réaction de ma mère qui m’a dit : tant que tu es heureux mon fils, c’est bien, mais évite d’aller dans des clubs trop proches au cas où on connaîtrait des gens…

C’est aussi ma relation de père qui m’a permis de faire ce chemin. J’ai pris conscience que tout ce que je disais et voulais transmettre à mes enfants, je ne me l’appliquais pas à moi-même : sois confiant, assume tes positions… J’ai donc assumé que je n’étais pas heureux dans ma relation. À l’époque, j’avais “besoin” d’être en couple et aujourd’hui, ce n’est plus le cas et je me sens épanoui.

Aujourd’hui, quand je rencontre quelqu’un, je suis transparent et j’explique tout de suite ma démarche. Ça choque souvent, ça déplaît parfois, ça intéresse aussi et certains me posent plein de questions pour essayer de comprendre si cela leur conviendrait.

Quand je parle de ma sexualité et du libertinage, je me sens souvent incompris. Pour l’expliquer, je sors du contexte de l’amour et de la sexualité et je compare cela à de l’amitié. On a tous différents niveaux d’amis. On s’entend avec des personnes pour un certain type d’activités. Par exemple, il y en a avec qui on va faire du tennis, d’autres avec qui on a des discussions profondes… On va chercher chez chaque personne les sujets qu’on a en commun. C’est comme ça que je vois les choses dans ma sexualité. J’ai des partenaires avec qui ça matche sexuellement, du coup, on se revoit. De là à dire qu’on puisse développer quelque chose d’autre d’un point de vue sentimental, c’est impossible. Ce n’est qu’un partage sur ce sujet de la sexualité.

Comment rencontres-tu tes partenaires ?

Je suis incapable de rencontrer quelqu’un sur un site de rencontre. J’ai besoin d’avoir une complicité, une attirance… Je peux aimer une rencontre, un moment de complicité autour d’un sujet. La séduction est très importante pour moi et m’excite presque plus que le rapport sexuel en lui-même.

Qu’attends-tu d’une relation avec des sentiments ?

J’ai tendance à fuir tout ce qui est “limitant”. Aujourd’hui, j’attends de la complicité, des moments de partage. Je suis très “cérébral” dans mes relations et ma sexualité, c’est pourquoi, c’est important pour moi d’avoir des sujets en commun, d’être challengé dans mes idées… J’ai ces attentes, autant dans mes relations sentimentales qu’amicales. En revanche, dans un “couple”, je n’ai pas d’autres attentes que définir ce qui peut faire du bien ou du mal à l’autre. Le but n’étant bien sûr de ne pas souffrir.

Comment vas-tu transmettre l’amour et la sexualité à tes enfants ?

Aujourd’hui, il y a tout type de sexualité. Je suis d’ailleurs ravi de voir que les jeunes sont très au clair avec ces sujets. Pour ma part, j’ai eu de la chance d’avoir une maman ouverte à ce sujet et j’aimerais en parler librement avec eux. J’aime le fait d’être non-cohabitant, mais si j’ai une femme que j’identifie comme ma compagne, je leur en parlerais. Pour autant, ma sexualité ne les regarde pas, ils n’ont à ce jour pas besoin de savoir que je pratique le libertinage, bien que je serais à l’aise de leur expliquer les différentes sexualités.

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